Le bridge en Loire-Atlantique au fil des décennies : d’un loisir initié à une passion partagée


  • Dans le paysage du loisir en Loire-Atlantique, le bridge occupe une place à part, oscillant entre tradition et modernité. Son histoire locale épouse à la fois celle du jeu en France et celle des clubs nantais, baulois ou guérandais qui ont vu défiler plusieurs générations de bridgeurs depuis l'après-guerre.

    Le premier club connu du département, le Club Bridge Atlantique, voit le jour à Nantes au début des années 1950, sur l’initiative de quelques notables férus de jeux de cartes. C'est dans une ambiance très feutrée – parfois même en robe longue et veston ! – que les donnes se disputaient à huis clos, loin de l’agitation urbaine. À cette époque, le bridge reste cantonné à une élite, ou s’apprend dans le cadre familial ou étudiant, notamment dans les garnisons ou chez les étudiants de médecine.

    Tout s’accélère dans les années 1970-1980 : l’arrivée des cours structurés, l’émergence de clubs à Châteaubriant, Saint-Nazaire ou Pornichet, ou encore la création du Comité du Bridge de l’Anjou (dont dépend la Loire-Atlantique) marquent l’entrée du bridge dans une ère d’ouverture. On estime qu’en 1982, il y a déjà près de 700 licenciés bridgeurs sur le département, selon la FFB (Fédération Française de Bridge).


L’explosion des clubs et la féminisation du jeu


  • Le grand boom du bridge en Loire-Atlantique coïncide avec celui observé au niveau national dans les années 1990 : la fédération recense alors une croissance de 65% des licenciés entre 1984 et 1997 (FFB). Cette dynamique se ressent localement, avec la création de nombreux nouveaux clubs ou sections bridge, souvent hébergés dans des maisons de quartier ou des associations culturelles.

    • À Nantes : multiplication des clubs dans les quartiers Ouest et Est, apparition de séances pour jeunes retraités, puis rapprochements avec les universités.
    • Sur la côte : mouvements d'été, tournois estivaux à La Baule, Pornic ou Saint-Brévin, qui attirent chaque année des centaines de joueurs des quatre coins de France.
    • En campagne : apparition des premières sections bridge dans des villes moyennes comme Ancenis ou Vallet dès la fin des années 1990.

    Un fait marquant : la féminisation progressive du bridge. Si, dans les années 1970, seulement 20% de licenciés étaient des femmes dans le département, elles représentent aujourd’hui plus de 48% des adhérents des clubs majeurs, un chiffre conforme à la moyenne nationale sur la saison 2022-2023 (Données FFB). Plusieurs clubs, à l’image du Bridge Club Nantais, proposent même des séances réservées "Dames et Mixte", une initiative qui séduit toujours plus de joueuses.


L’impact du numérique : le bridge connecté prend son envol


  • Si la pratique du bridge a longtemps été associée aux salles de cartes ou salons, la dématérialisation et l’essor d’Internet ont bouleversé durablement l’écosystème local. Dès 2005-2010, quelques clubs précurseurs commencent à utiliser le logiciel BCDI pour la gestion et la diffusion instantanée des résultats de tournois. D’autres suivent avec l’intégration de plateformes comme Funbridge ou BBO (Bridge Base Online) pour l’entraînement en ligne ou l’initiation à distance (Funbridge, BBO).

    • En 2017, selon l’enquête menée auprès des clubs affiliés à la FFB Anjou, 34% des membres du département jouaient également sur Internet au moins une fois par mois.
    • 2020 marque un tournant : avec la crise sanitaire liée à la Covid-19, le nombre de parties en ligne explose, et 81% des clubs en Loire-Atlantique proposent une activité en visioconférence ou sur plateforme numérique pour maintenir le lien.
    • Plusieurs clubs adaptent alors leurs cours de perfectionnement en distanciel, permettant aux débutants comme aux confirmés de rester actifs sans se déplacer.

    Cette hybridation de la pratique perdure, même après le retour en présentiel. Les tournois en ligne restent prisés des jeunes joueurs, tandis que nombre de clubs ont renforcé leur communication via les réseaux sociaux ou les newsletters numériques pour maintenir et développer leur communauté.


Portraits et initiatives : le renouveau par la diversité


  • Ce qui fait la richesse de la pratique du bridge en Loire-Atlantique, c’est aussi la multiplicité des profils. On retrouve :

    • Des jeunes issus des universités nantaises, attirés par l’aspect stratégique du jeu et les compétitions interclubs (le Trophée des Jeunes Bridgeurs de l’Ouest a réuni une cinquantaine d’étudiants en 2023 - source : Université de Nantes).
    • Des seniors actifs, pour qui l’activité bridge rime avec maintien cognitif et création de liens durables.
    • Des familles, notamment lors des initiations proposées à l’occasion d’évènements comme les forums associatifs départementaux.

    Des initiatives originales voient régulièrement le jour. On peut citer :

    • Le Challenge départemental interclubs, lancé en 2018, qui permet aux clubs ruraux et urbains de s’affronter dans une ambiance conviviale (plus de 200 participants chaque année, hors contexte de restrictions sanitaires).
    • L’école de Bridge Pierre-Henri Souverbie, fondée à Nantes en 2005, reconnue pour son innovation pédagogique et ses ateliers de découverte dédiés aux juniors.
    • Les “Soirées Découverte” itinérantes, pilotées depuis 2019 par le Comité Anjou Bridge, qui font étape aussi bien à Saint-Herblain qu’à Vertou ou Nort-sur-Erdre.

    On notera également le succès grandissant de la Journée du Patrimoine du Bridge, organisée chaque printemps à La Baule, qui réunit amateurs de toutes générations autour de simultanés interclubs et d'ateliers ludiques.


Chiffres-clé : l’état actuel de la pratique en Loire-Atlantique


  • Aujourd’hui, le bridge en Loire-Atlantique, c’est :

    • 21 clubs affiliés FFB répartis sur l’ensemble du département (source : Annuaire FFB 2023)
    • Environ 1200 à 1300 licenciés chaque saison (contre 980 en 1999, 1500 au pic de 2012, évolution FFB consultée en 2023)
    • Une pyramide des âges qui commence lentement à se rééquilibrer : selon la FFB, en 2023, près de 22% des licenciés ont moins de 55 ans, alors qu’ils n’étaient qu’11% en 2007.
    • Près de 60% des licenciés participent à au moins un tournoi départemental chaque année.

    L’un des enjeux clés reste aujourd’hui la fidélisation et la formation des jeunes, enjeu partagé à l’échelle nationale, mais où la Loire-Atlantique fait figure de département moteur grâce à l’appui de clubs dynamiques et de bénévoles particulièrement engagés.


Vers un bridge durable et ouvert à tous : défis et perspectives


  • Au-delà de la pratique ludique ou sportive, le bridge local s’affirme progressivement comme vecteur social et culturel. Les clubs multiplient les partenariats avec :

    • Les maisons de quartier, pour intégrer des publics éloignés du jeu.
    • Les établissements scolaires, notamment avec le programme “Classe-Bridge” qui touche maintenant plus de 8 collèges de Nantes et sa périphérie.
    • Les EHPAD et associations d’aidants, dans un esprit d’échange intergénérationnel.

    Le département s’illustre régulièrement lors des phases finales des compétitions nationales (trois médailles au Trophée de France Senior Mixte entre 2017 et 2023, Comité Anjou Bridge). Les talents locaux, souvent formés dès l’école, restent fidèles à leur terre et rayonnent lors de grandes manifestations, tels les Simultanés Universitaires, ou le Festival de Bridge de La Baule.

    Le défi majeur des prochaines années est double : renouveler les effectifs en accueillant plus de jeunes joueurs, et ouvrir toujours davantage les clubs aux nouveaux publics, tout en préservant ce qui fait la singularité du bridge en Loire-Atlantique – son esprit convivial, la transmission et l’attachement au jeu bien fait.


Une aventure collective qui continue


  • Loin d’être un jeu figé, le bridge en Loire-Atlantique prouve chaque année sa capacité à tisser du lien et à se réinventer. Que l’on soit héritier des salons feutrés d’antan ou nouvel adepte conquis par une initiation en visio, chacun peut trouver sa place dans une communauté plurielle et dynamique. L’envie de jouer ensemble, d’apprendre et de partager, forge aujourd’hui comme hier ce formidable creuset de passionnés qui anime le département.

En savoir plus à ce sujet :